Le barreau d'Alençon vous
souhaite la
bienvenue Monsieur le Procureur.
Vous avez choisi, en ces temps de
fusion de régions, de franchir cette Seine qui nous sépare, et vous montrez
ainsi qu'il y a une vie judiciaire au-delà de Grand-Quevilly ou Sotteville,
pour être équitable je vous rassure d'aucuns ont du mal à imaginer une vie
au-delà d'Ifs ou Colombelles dans la périphérie caennaise ou au boulevard
périphérique et du tunnel de St Cloud !
Vous succédez à Madame Etienne
dont je veux à nouveau saluer l'action efficace, rapide et pertinente, sa
personnalité, sa disponibilité.
Les avocats du Barreau d'Alençon
sont des auxiliaires de justice indépendants, comme tous leurs confrères de
France, soucieux de la défense des justiciables, tous, au pénal comme au civil,
en tutelle comme en affaire prud'homale, en matière commerciale comme
administrative.
Je cite volontairement tous ces
aspects de notre action car vous arrivez dans un Tribunal dans lequel
l'ambiance est sérieuse, cordiale quand il le faut, chaleureuse même, un
ressort à taille humaine et qui souhaite garder ses atouts et sa diversité.
Vous allez découvrir au fil du
temps la vie quotidienne, peut-être, je ne vous le souhaite pas, allez vous
prendre une carte d'abonnement chez les marchands de pneus, je vous
expliquerai, mais surtout vous devrez gérer les carences en moyens.
Nous serons à vos côtés chaque
fois qu'il sera question d'obtenir le minimum qu'on peut attendre des pouvoirs
publics, hélas nous sommes loin du compte.
Les avocats réclament, quémandent,
une dotation d'aide juridictionnelle permettant cette défense de tous à
laquelle je faisais allusion.
Les avocats, comme les magistrats
se plaignent de l'insuffisance de personnel de greffe pour assister les
magistrats eux aussi insuffisants en nombre.
Nous ne tolérons plus le manque
de papier qui nous prive de copie de dossiers, nous ne tolérons plus de
travailler sans être au moins indemnisés.
Nous ne tolérons plus d'être la
variable d'ajustement permanente de l'incapacité de la chancellerie à gérer
correctement ses affaires.
On nous prépare en douceur à un
travail mutualisé avec Argentan, mais si la volonté c'est de fusionner nos
Tribunaux de Grande Instance pourquoi ne pas nous le dire franchement ? Nous
mettrions alors en place des groupes de travail, nous pourrions nous organiser
et prévoir au lieu d'agir encore et toujours comme nous le faisons depuis 30
ans à la dernière minute.
Au lieu de cela, on nous cache
des décisions, on rabote les dotations, on retarde des choix ; au final,
on ne peut plus exercer nos métiers si importants pour notre pays et auxquels
nous tenons tant, dans de bonnes conditions.
Quand nous nous sommes rencontrés
vous avez utilisé le mot famille pour qualifier le monde judiciaire.
Vous m’avez indiqué que certains
de vos aïeux étaient avocats, vous avez décidé de suivre une autre voie que je
ne commenterai pas, mais vu votre jeune
âge encore la possibilité de vous rattraper et de suivre l’exemple de vos ainés
familiaux !
Cette famille se doit d’être
soudée car elle est un pilier de notre état de droit.
Notre constitution a accordé une
place à part à l’autorité judiciaire et nous tous participons à son bon
fonctionnement.
Si nous n’y prenons pas garde,
nous allons montrer des signes de faiblesse et certains surveillent ces
faiblesses de très près.
Nous nous devons d’être
solidaires pour défendre l’aménagement du territoire judiciaire tel que nous le
pensons.
Permettre à chacun de trouver
dans chaque département au moins une justice complète, efficace, à taille humaine
et non pas des grands pôles centralisés dénués de toute humanité.
Nous devons avoir l’exigence de
bien faire et l’Etat doit avoir l’exigence de nous permettre de bien faire
notre travail car il est capital pour notre liberté.
Ce ne sont pas là des
revendications catégorielles mais je pense la juste expression d’une inquiétude
pour notre famille.
Gardons cependant l’espoir,
continuons Madame le Président à travailler comme nous le faisons
ensemble !
Monsieur le Procureur, la famille alençonnaise
vous accueille chaleureusement.
Je vous réaffirme notre totale
disponibilité pour faire avancer les choses, les faire évoluer, mais vous
assure aussi de notre totale détermination à voir préserver notre indépendance,
notre statut, ceci dans l'unique intérêt des justiciables.
J'ai beaucoup apprécié votre
démarche de venir me rencontrer à l'ordre, vous confirmez ainsi cette ouverture
au dialogue et au travail en commun que vous m'avez présentée lors de notre
entretien et je vous en remercie.
Si avec vous, comme avec Madame
Le Président, Madame la directrice de Greffe et tous ceux qui interviennent
dans ce palais, nous pouvons maintenir le dialogue direct et simple, alors nous
pourrons progresser et faire entendre une voix commune qui est la seule source
d'espoir d'amélioration.
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